Crous : la fondation Abbé Pierre alerte sur les expulsions des étudiants

Actualité publiée le 25/09/2023 à 11h08
Crous : la fondation Abbé Pierre alerte sur les expulsions des étudiants

La fondation Abbé Pierre lance une alerte au sujet des expulsions de logements visant les étudiants dans des résidences universitaires gérées par les Crous. Ces procédures touchent principalement des jeunes en situation précaire et socialement isolée.

L'association, qui se bat contre le problème du mal-logement, a publié un rapport le jeudi 7 septembre. Ce rapport met en évidence les expulsions locatives ciblant les étudiants vivant dans des résidences universitaires. Elle critique notamment le manque de moyens des Crous, qui rencontrent des difficultés à accompagner les jeunes expulsés de leur logement à la suite de décisions judiciaires.

Le rapport de la fondation Abbé Pierre recense ainsi 221 décisions d'expulsion prononcées par des tribunaux administratifs entre janvier 2022 et février 2023. Ces expulsions concernent principalement les cités universitaires de Versailles, Lille Nord Pas-de-Calais et Aix-Marseille-Avignon. Les trois principales raisons justifiant ces procédures d'expulsion à l'encontre des étudiants sont les arriérés de loyer, l'absence de demande de renouvellement et la perte du statut étudiant.

 

Le phénomène des expulsions pendant la trêve hivernale

Il convient de noter que depuis 2018, les expulsions des résidents du Crous sont désormais traitées exclusivement par le tribunal administratif, et non plus par le tribunal judiciaire comme c'était le cas dans le droit commun. Cette nouvelle procédure vise principalement à réduire le délai d'expulsion des étudiants en difficulté. Manuel Domergue, directeur des études à la Fondation Abbé Pierre, souligne que "les étudiants qui éprouvent des difficultés à payer leur loyer peuvent être expulsés de leur logement universitaire en quelques jours, même pendant la période hivernale".

La Fondation Abbé Pierre dénonce également l'absence de recours pour les étudiants contraints de quitter leur logement à la suite d' une décision du tribunal administratif. Manuel Domergue ajoute que "les Crous, en raison de leurs ressources limitées, ne disposent ni du personnel ni des compétences juridiques nécessaires pour accompagner les étudiants expulsés". Dans la plupart des cas, aucun hébergement de remplacement n'est proposé à ces jeunes en situation de précarité, qui souffrent souvent de troubles psychologiques.

L'association demande notamment que les procédures d'expulsion visant les étudiants logés dans les cités universitaires soient réintégrées dans le cadre du droit commun, afin que les jeunes puissent bénéficier des mêmes recours que tous les citoyens. Elle préconise également de renforcer ou de diversifier les moyens d'information des étudiants concernant les campagnes de renouvellement de bail, ce qui pourrait contribuer à réduire les risques de violation de leurs droits.

 

Étudiants séparés de leur famille à distance

L'étude met également en évidence que les expulsions ne touchent pas tous les profils d'étudiants et ont des conséquences sur le parcours des personnes concernées. Les résidents interrogés qui font l'objet d'expulsions ont en commun d'être souvent socialement isolés et éloignés géographiquement de leur famille. La fondation alerte sur la souffrance psychologique que vivent ces résidents en raison des pressions parfois brutales exercées par le Crous et de l'incertitude liée à l'application inégale de la trêve hivernale. Cette situation est encore plus difficile pour les hommes (79 % des cas d'expulsion), qui selon l'association, rencontrent plus de difficultés pour trouver un hébergement temporaire.

L'insuffisance de logements dans les résidences gérées par le Crous, qui compte environ 175 000 places, aggrave la situation. Cela ne permet d'héberger que 25 % des 712 000 boursiers d'État et seulement 6 % de l'ensemble des 2,7 millions d'étudiants français. Corinne Loué, étudiante à la Sorbonne ayant participé à l'étude, déplore que cette pression liée à la demande de logements pousse le Crous à exercer des pressions sur les résidents visés par des expulsions, obligeant de nombreux étudiants à quitter leur logement avant même que le tribunal administratif ne prenne sa décision.